Nous n'avions pas eu le temps de commenter le Germinal de France 2 lors de sa diffusion. Une récente conversation avec un ami nous l'a récemment remis en mémoire...

Disons-le tout net, pour nous, le Germinal de Julien Lilti est une imposture grotesque ! il est affligeant de nullité, de contresens, d'anachronismes – entre autres, linguistiques, et d'interpolations inadmissibles ! Que la presse-papier et la radio l’aient encensé est une infâmie, une infâmie contre l’école - censée n’être que le temple de l’ennui -, contre la littérature, contre le cinéma et contre Zola !

On a beau dire que le « wokisme » n’existe que dans l’esprit des réacs de tout poil, cette adaptation calamiteuse - idéologique de part en part -, est la fille bâtarde du mélodrame et de ce courant de pensée à « demi-savant » … qui ne pense pas !

Que vient faire un marchand de vin noir – ancien dirigeant syndical embourgeoisé qui plus est -, dans le pays minier du Nord, dans la deuxième moitié du XIXème siècle ? Comment peut-on mobiliser des figures évoquant le ku klux klan, avec leur cagoule percée de deux trous pour les yeux, contre les « gueules noires » de notre XIX° siècle ? pourquoi confier à un acteur arabe le rôle du petit patron progressiste, novateur et humaniste Deneulin au mépris de la réalité historique et de la sociologie du pays minier ?

Notez que ce type d’adaptation est éminemment pervers. Se permettre de critiquer cette « créolisation » de la distribution (pour reprendre le vocabulaire de la LFI), ce serait s’exposer à l’accusation infâmante de racisme !... Aussi les commentateurs s’en gardent-ils comme de la peste, rebaptisant « colorblind casting » ce qui est en réalité est un parti-pris idéologique ! Qu'aurait-on dit si les nervis du patronat avaient été incarnés par des acteurs noirs ou arables ? La critique de « l’appropriation culturelle » ne va jamais que dans un seul sens au pays de la bien-pensance : on peut stigmatiser les « blackfaces » et faire interdire Les Suppliantes d’Eschyle à la Sorbonne sous prétexte que les Danaïdes, conformément à la tradition antique, portent un maquillage « cuivré », on peut exiger qu’Othello soit interprété par un ténor noir dans l’opéra de Verdi mais on ne peut pas impunément dénoncer des anachronismes de ce genre….

Et que dire des personnages féminins ? que dire de la sexualité ? Après #MeToo et le mouvement des Gilets Jaunes, pas question de fantasmer sur la vitalité sexuelle du prolétariat comme Hennebeau et… comme Zola, bien sûr. La Mouquette devient une vraie midinette chez Julien Lilti ! Pas question de montrer l’émasculation de Maigrat. Cela pourrait rappeler certaines figures féminines des Gilets Jaunes, hilares, brandissant un godemiché en éructant des grossièretés à faire rougir un corps de garde ou apprenant à leurs enfants des slogans d’une vulgarité immonde… Si nos souvenirs sont bons, les débordements sexuels – si l’on excepte le viol de Catherine et le « dessert » de Maheu -, sont du côté de la bourgeoisie chez Julien Lilti… avec l’inévitable scène de sodomie que l’on chercherait en vain chez Zola mais qui est devenue un must des générations de cinéastes biberonnés au porno….

Que dire du jeu des acteurs ? Affligeant en général… il n’y a guère qu’Alix Poisson pour s’en tirer honorablement.

Et que dire des jeux de caméra ? pratiquement toujours filmé en plan rapproché, le feuilleton manque complètement les points de vue, les perspectives, les cadrages savamment orchestrés par Zola ! Il faudrait revoir cette série pour en dire davantage, mais une chose est certaine à nos yeux : ce n’est pas, comme le prétend Lilti, « faire entrer le spectateur en vérité profonde avec les personnages » (phrase qui ne veut strictement rien dire) que de les assaisonner à la sauce du « western social » !...